Introduction  :

Qu’est-ce que la morale ? Est-ce que cela existe ? Quels problèmes pose-t-elle ?

  • Existe-t-il quelque chose comme la morale, qui ne soit pas le surmoi, la coutume, un code de soumission, ou des lois intériorisées ? Quelque chose qu’on définirait (et la question est de savoir si cette définition a un objet ?) comme une autonomie de la volonté, ie une volonté totalement légitimée par elle-même et orientée sans hésitation vers une fin qui confirme sa valeur.

  • Si la morale existe, elle pose 4 conditions (que nous avons résumées dans la carte) :

  1. Je peux me conduire moi-même et j’ai le souci de ma dignité.

  2. Je pose des fins à mes actions qui ne sont pas réductibles à des intérêts matériels ou sociaux.

  3. Autrui pose une limite à cette conduite.

  4. Je me fais une représentation idéale de la conduite humaine.

Est-ce un mot qui désigne quelque chose de particulier, de distinct, ou bien de déjà dit avec d’autres mots ?

Un concept clair et distinct qui saisit une discussion spécifique de l’action ou une idée confuse qui assimile des réalités obscures ?

Morale ? =

Surmoi

Ensemble des règles intériorisées dans la première éducation.

Culture, religion

Règles relatives à une communauté humaine partageant le même sens des valeurs ou la même idée d’une humanité digne.

Déterminismes (biologique ou sociologique)

Objectifs de l’action fixés par les aspirations naturelles de l’homme et non un choix. Approche matérialiste qui voit dans la morale une systématisation des élans naturels spontanés donc irréfléchis et sentis comme adéquat à l’existence concrète.

Code de soumission

Construction idéologique qui soumet des hommes à d’autres en aliénant aussi bien leur corps que leur pensée.

Mystification (+/- bienveillante).

Construction idéologique manifestement malhonnête qui cache ses intentions de soumettre une partie des individus formant la communauté.

A) Explication de la problématique :

Les usages langagiers le disent : « Se conduire », « se tenir » ≠ « se laisser aller », « suivre ses penchants »

Être origine, début de l’action. Faire quelque chose de nouveau. La natalité dit H. Arendt est une promesse de nouveau.

Pour pouvoir affirmer que la morale existe, il est nécessaire de démontrer que nous sommes ou pouvons devenir auteur de notre action. Détenir la force d’initiative, à partir de soi, se faire cause de son action, voilà ce qui est parfois appeler autorité ou liberté. Lagent veut se faire acteur, auteur de son action : l’origine, c’est-à-dire le point de départ et le sens. Ne pas subir, ne pas être l’instrument d’une activité vide de sens (comme l’activité naturelle) ou maîtrisée par d’autres (comme l’action aliénée). L’action morale est d’abord l’action revendiquée par un auteur.

L’action naturelle n’a pas de sens ; elle n’a pas de valeur morale. Les hommes peuvent-ils faire cette différence : action naturelle/action sensée et donc moralement évaluable ?

L’action aliénante n’a pas de valeur : elle n’intègre pas la volonté de l’acteur, elle le transforme en instrument.

Devenir auteur suppose de récupérer sa force d’agir personnelle au nom de quelque chose assumé personnellement.

Donc, on peut faire les différences suivantes : action naturelle/action technique/action professionnelle/action politique.

Types d’action

Caractérisation

Exemples

Auteurs

Action naturelle

Sentie comme indispensable pour vivre en bonne santé.

Créer les conditions d’une bonne température.

Pas d’auteur : nécessité naturelle qui s’impose par le biais de la sensibilité humaine.

Action technique

Requise pour atteindre une réelle efficacité.

Regonfler les pneus de son vélo pour qu’il puisse rouler.

Tout individu rationnel soumis à des règles matérielles et techniques.

Action professionnelle

Inscrite dans une coopération utile pour atteindre une efficacité collective, ou répondre à des attentes sociales.

Produire des biens consommables par la population.

Tout individu social faisant partie du collectif de travail.

Action politique.

Démarche collective qui vise à réaliser le sens commun de la justice telle qu’elle inspire les lois effectives de ce pays.

Définir un autre mode de répartition des richesses par l’impôt.

Tout citoyen déterminé à agir par les institutions de sa communauté politique.

Action morale ?

Initiative visant à donner du sens et de la valeur à l’existence humaine.

Être généreux envers autrui, être attentif à sa fragilité.

La personne désintéressée animée par un choix de valeur

L’action morale fait de l’homme autre chose qu’un être vivant soumis à la nécessité naturelle ou qu’un instrument de la rationalité technique ou politique. Il choisit la valeur qui donne à son existence une grandeur, une dignité, à ses yeux. Il prétend ainsi déjouer le caractère naturel de la seule survie : absurde, répétitive, destructrice, éphémère.

L’action morale n’est pas contraignante : elle peut être ignorée par l’individu qui peut se donner d’autres modalités d’action (technique, sociale, politique). C’est donc personnellement et librement qu’il se donne des limites, des objectifs, des règles à suivre supplémentaires. Mais est-il capable de faire cela ?

La question est complexe, elle en contient d’autres :

Qu’est-ce que soi ? Le Moi est-il une réalité stable, unifiée, identifiable ?

Comment être sur qu’il est sa propre autorité ? La liberté n’est-elle qu’une illusion de la conscience ?